Petit texte de William

Ces mots raisonnaient dans sa tête, sans cesse, comme s’ils étaient ancrés pour toujours. Elle était là, sur le pont du navire, fixant inlassablement l’océan. La pluie était de plus en plus accrue et le ciel aussi sombre que les ténèbres. Elle semblait figée, tel un tableau obscur d’un peintre. Qu’attendait-elle ? Dieu seul le savait. Dieu semblait d’ailleurs l’avoir abandonnée. Si elle s’était retrouvée sur ce navire, sur le Hollandais Volant, ce n’était pas par hasard. Qui était cette magnifique femme, entièrement vêtue de rouge, avec des magnifiques cheveux roux coupés au carré et ce regard si triste ? Qu’avait-elle donc fait pour se retrouver à errer dans les méandres de ce navire ?

Soudain, elle frissonna et se retourna. Elle semblait chercher quelqu’un éperdument. Elle marcha le long du pont, toujours à scruter l’océan. Sa démarche était élégante, digne d’une lady anglaise. Ses vêtements lui allaient à ravir, moulant à la perfection ses formes généreuses. Belle et tentatrice, elle semblait flamboyer de milles feux. Elle soupira légèrement et se laissa aller et parla tout doucement :

Elle porta ses mains à son visage et pleura à chaudes larmes. Belle et dangereuse Madame Red. Son visage angélique vous amènera sans doute à lui faire confiance, son sourire radieux et ses yeux moqueurs. Mais qui sait ce qui se cache derrière cette carapace. Quel lourd secret une telle lady peut-elle cacher ? Les larmes n’ont pas le temps de couler, que la pluie incessante les enlève, sans se soucier de cette femme. Après tout, qui pouvait se soucier d’un assassin. Car, c’était bien la vraie nature d’Angelina Red, de son vrai nom Angelina Dulles, veuve du Baron Barnett.

Elle était un médecin réputé. Elle avait une famille, un neveu surtout. Ciel Phatomhive… Elle le chérissait comme son propre fils. Elle avait une sœur et surtout un beau-frère qu’elle aimait passionnément. Oui passionnément… Elle qui n’aimait pas le rouge de sa chevelure, c’était à la suite d’un simple compliment qu’elle s’était mise à aimer cette couleur. Elle s’était même mariée et attendait un heureux évènement.

Alors, pourquoi une telle femme avait-elle basculé ? Pourquoi était-elle devenue le monstre sanguinaire qui avait fait frissonner les bas quartiers de Londres ? Pourquoi elle était devenue Jack l’éventreur ? Peut-être qu’un jour elle se déciderait enfin à avouer son terrible secret. Peut-être qu’un jour quelqu’un viendrait la délivrer de ce cauchemar… Pendant ce temps, elle fixerait inlassablement l’océan.

La pluie caressait délicatement le visage de Madame Red. C’était comme s’ils communiaient en silence tous les deux. Comme si elle lui confiait ses secrets les plus sombres, en espérant être lavée de ses crimes les plus odieux. Soudain, elle frissonna légèrement. Etait-ce le froid ? Elle ne pensait pas. Elle ressentait une présence près d’elle. Elle sentait un regard se poser sur elle et l’examiner. Elle resta stoïque, se demandant si c’était la personne qu’elle attendait depuis longtemps.

Elle ferma les yeux, respirant l’air frais. Elle l’attendait maintenant. *Rejoins moi mon preux et tendre inconnu, délivre moi de ce tourment.* Et soudain, quelque chose effleura délicatement ses épaules. Le manteau de cet inconnu réchauffait à présent Angelina. Son cœur battait à tout rompre et ses sens étaient en alerte. Elle se retourna délicatement pour observer celui qui venait enfin la sortir de cette torpeur.

Il avait tout du parfait gentleman. Ni trop grand, ni trop petit, il avait une belle constitution. Son allure vestimentaire montrait qu’il était sûrement issu d’une famille de noble. Elle examina ensuite le visage de l’inconnu et un doux sourire orna son visage. L’homme semblait être charmeur, son visage inspirait confiance et bien être. Tout dans cet homme poussait Madame Red à se jeter dans ses bras.

Pourtant, une petite voix blottie au fin fond de son être lui susurra de se méfier. Etait-ce cet instinct de meurtrière qu’elle avait développé dans sa vie antérieure ? Cet instinct qui la poussait à se méfier de tout, y compris de son unique famille ? Elle était désorientée, il lui rappelait tellement l’homme qu’elle avait aimé avec passion et déraison. Elle se rapprocha de lui et de ce sourire charmeur et de cette voix tentatrice, elle lui murmura ces quelques mots :

« Je ne suis plus seule maintenant. Et je dois avouer que la compagnie n’est pas déplaisante. » Elle lui accorda un petit clin d’œil amuseur. Elle aimait le danger, elle aimait le frisson et se demandait ce que l’inconnu lui réservait comme surprise.

Elle riait doucement. Elle repensait à tous les crimes qu’elle avait commis. Elle avait été certes une Lady de son temps et de surcroît un médecin réputé. Mais elle avait fini dans la déchéance et le cercle infernal de la violence. Si elle ne savait pas à qui elle avait affaire, l’inconnu ne le savait pas non plus.