Venait de débuter une journée des plus banales. L'installation au Manoir Adamson était très récente, mais la Marquise se lassait bien vite d'un quotidien répétitif. Elle s'était levée de bonne heure, avant de se rendre à la salle de bain pour s'y toiletter et s'y détendre un bon quart d'heure. Une fois sortie, ce fut Lydia, l'une de ses deux servantes qui l'habilla. Elle fut vêtue d'une superbe robe rouge et blanche, assez longue et plutôt épaisse pour convenir aux désirs de la jeune fille. Celle-ci éprouvait quelques difficultés à s'acclimater à la météo du pays, elle qui avait toujours vécu dans le Sud de la France. Autant dire que voir la pluie aussi souvent était assez déstabilisant pour elle. Une fois correctement habillée et chaussée, elle quitta la salle de bain; laissant le nettoyage de la pièce aux bons soins de sa domestique. Elle emprunta les escaliers pour se rendre à la salle à manger afin d'y prendre son petit-déjeuner. Johan avait déjà prit soin de le préparer alors que la Demoiselle prenait son bain. Elle s'installa à table; ce dernier lui servit un chocolat chaud et lui présenta les différents mets qu'il avait disposé. Candice se contenta d'un fruit et de quelques viennoiseries pour accompagner sa boisson, après quoi elle quitta la pièce pour se rendre au grand Salon.
Ses doigts effleurèrent les touches du piano qui y trônait. Elle avait très envie de jouer... Elle ouvrit le recueil de partition qui se trouver là, un peu au hasard. Für Elise de Beethoven... Parfait. La Lady s'assit sur son siège et commença à jouer. Ses mains parcouraient l'instrument avec grâce et légèreté, et le son qui s'en échappait était impeccable. Alors qu'elle entâmait la section suivante, elle eut une hésitation et fit une fausse note. Contrariée, elle grimaça et s'arrêta net. Elle se saisit du recueil et se dirigea vers la bibliothèque, dont la porte était déjà ouverte. S'installant sur l'un des fauteuil, elle attrapa un crayon qui siégait sur la table la plus proche et fit quelques annotations près des portées de la partition. Ce n'était pas un original, évidemment. L'original était rangé sur l'une des étagères d'en face. D'ailleurs, pourquoi ne pas y jetter un oeil ? La Marquise leva les yeux, et remarqua que Lydia était en train de faire la poussière tout en haut du meuble. Les originaux qu'elle voulait consulter se trouvaient à quelques centimètres d'elle, cela ne pouvait pas mieux tomber.
- Lydia, s'il te plait...
Elle n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Lydia ne l'avait pas entendue arriver, et avait été surprise. Elle perdit l'équilibre et tomba du haut du rayonnage. Le meuble perdit l'équilibre à son tour et pencha dangereusement vers l'avant. Les livres tombaient un à un sur le sol et la pauvre servante, à moitié sonnée, était dans l'incapacité de se mouvoir. C'est alors que Johan, sortit d'on-ne-sait-où, immobilisa la bibliothèque dans sa chute et permit à la servante de s'en sortir sans encombre. Candice, ayant assisté impuissante à la scène, fut tout de même soulagée de constater que sa domestique était saine et sauve. Une fois le meuble remit en place, les deux jeunes gens durent s'accomoder d'une tâche qui promettait d'être longue : La récupération et le rangement de tous les livres. La Demoiselle voulu leur venir en aide, après tout elle tenait beaucoup à ces livres et puis elle se sentait un peu responsable. C'est à ce moment-là que Mathilde, la seconde servante, se présenta à l'entrée de la pièce. Mathilde avait l'habitude d'être très discrète, elle parlait peu et s'exécutait efficacement, dans le calme. La Marquise l'interrogea du regard, surprise par sa soudaine apparition.
- Vous êtes demandée, Mademoiselle...
Une visite ? A cette heure-ci ? Candice tourna le regard en direction de l'horloge qui indiquait onze heure passée. Comme le temps passe vite ! Elle se releva immédiatement pour se rendre dans l'entrée où elle croisa Neptune, son fidèle chien de garde. Ce dernier n'était pas du genre à s'en prendre aux invités qui entraient par la porte, il était donc aussi tranquille que d'habitude. Les nouveaux arrivants se trouvaient déjà dans le hall d'entrée, après tout il était impoli de faire patienter ses hôtes dehors. La jeune Lady s'approcha de ses invités surprises, se saisit du pans de sa robe qu'elle releva légèrement avant de placer son pied droit à l'arrière de son pied gauche et de fléchir les genoux tout en s'inclinant vers l'avant. Une révérence était de coutûme pour toute jeune fille bien élevée en présence d'une personne importante. Car il était facile de conclure avec un simple coup d'oeil qu'il ne s'agissait pas de n'importe qui. Une fois les salutations effectuées, la Demoiselle se redressa et avec un sourire agréable s'adressa à ses invités :
- Je suis ravie de vous accueillir dans ma demeure. Que me vaut l'honneur de votre visite ?
La Marquise ne se présenta pas. Si cette personne lui avait rendu visite, c'est qu'elle savait qui elle était. Et la bienséance voulait que ce soit les hommes qui prennent les initiatives. Elle espérait en effet que celui-ci daigne se présenter, car elle n'avait pas l'impression de le connaître. Cependant, elle ne voulait pas se montrer trop curieuse, c'est pourquoi elle s'était abstenue de lui poser directement la question. C'est avec un sourire toujours aussi accueillant que la jeune fille attendait une quelconque réponse de la part son hôte.